Khris Anthelme Apécien
Nombre de messages : 7546 Age : 71 Date d'inscription : 06/12/2009
| Sujet: Le Muzain Mer 15 Juin 2011 - 21:12 | |
| Reflets
Pour ouïr nos saisons au printemps qui s’enchaîne, Une peine ouvre-moi, j’y poserai mon cœur Faisant ombre aux sanglots du vieil astre moqueur En glissant sur la nue une aurore sans chaîne.
Ton âme ainsi ma douce, oubliera ses hivers Pour ne voir dans tes yeux que les feux de l’automne, Comme une fleur offerte à l’aiguail des prés verts Qui délaisse au ruisseau ses longs chagrins divers Essuyant les reflets d’une aube monotone.
Inlassable raison
Quand tu me dis, « Vois l’horizon, sur la montagne, La neige au blanc bleuté », je ne vois que tes yeux Pour y plonger les miens, sous le velours des cieux Mon âme s’abreuvant de ce rai qui me gagne.
Je t’avoue ô ma chère, inlassable raison, Que sur ton sein je fonds et que le mien tressaille M’égarant sur l’azur dans l’ombre d’un tison, Pris dans une tourmente offrant sa floraison, Je m’envole et m’étends, je me meurs, je m’émaille !
Muzain pour une plume
Te souviens-tu Major ! Entre index et le pouce, Tu brillais, essuyant sur un coin de buvard Mon tout premier écrit hésitant et soiffard Qui s’écoulait, un trait longeant ta taille douce.
Tu savais me pêcher au fond de l’encrier Les mots pour les forger à l’encre violine, Bien trempés, révoltés, ceux que j’ai pu crier Sur les chemins naïfs d’un âge aventurier Où se mêlait l’orgueil à grands coups de bottine.
Quand le soir, l’œil trop las, avec soin au plumier Je te bordais, rangée aux côtés de mes songes, Pour qu’au delà des nuits se vide mon larmier Bercé d’une embellie au creux de mon sommier, Cette inspiration, qu’aujourd’hui tu prolonges.
Ma raison t’accompagne, oscille à mon regard, Ma mémoire respire, une odeur m’éclabousse Et je m’enivre au bois de l’écrin qui me pousse A te servir un vers en prime à ton égard.
Regard
Dis, s’il te plaît, dessine-moi l’amour ! Celui qui se presse un matin de pluie, Que l’on recroise un soir et qui s’essuie Dans un regard, plaidant le demi-tour.
Toi, qui pouvais croquer la poésie Dans une strophe ou l’ombre d’un contour, Peins ce tableau d’une rime choisie Pour que la scène à mon œil soit saisie, Fais-en l’éclat, pour ma belle au retour !
Une fleur hors saison
Son teint tremble essuyant les frimas du matin, Son âme se fracasse, injuriant la bise Qui lui glace le sang, sa croix la tétanise Chagrinant tout son être, affligeant son destin.
Puis, glissant sans raison, s’égare sur la terre Qu’elle avait trop flattée, en quittant son jardin Pour semer une graine au sommeil d’un parterre, Qu'inondera le pleur d’une enfant qu’on enterre, Emportant sa couleur, son prénom féminin !
Rêve
Oserai-je avouer sur mon honneur ma tendre, Que par mégarde, si, vos draps sont tourmentés, Ce n’était que pour mieux vous voir à mes côtés Sur l’oreiller défait, songeant à vous attendre.
Je ne m’étendrai point le jour sur ce détail Priant que soit ma nuit plus courte que la veille, Contraint de n’exister qu’avec votre chandail Renversant son parfum, captif de son tramail, Un lion rugissant… ! Pourvu qu’il me réveille !
Pauvre existence
Si notre vie assume avec crainte un tracas D’une ampleur résonnante autant que le missile Qui dans les airs se glisse alerte, et se faufile Au sol pour ne conter que malheurs et gravas.
Elle ne sait, juger d’une lutte futile Son sarcasme, étayant de lourds et vains combats Chus par une parole inerte et puérile, Sans réfléchir au temps qui se meurt, se mutile De tout espoir fortin, courant vers le trépas.
Lumière d’automne
Le soleil de mes nuits baignait dans son halo De glace réfléchi pour soulever son voile, En ouvrant sa paupière, irisant son étoile, L'astucieux fanal me joua son solo.
M’éblouissant l’esprit de son parasélène A l’effet lunatique exprimant ses cristaux, Et mon œil en jouit prisé du phénomène, Se renversa mon âme au devant de la scène, Ô Dieu, quel jubilé, comme tes cieux sont beaux !
Ciel automnal
Il me semble marcher sur un ciel automnal, Mon pas se fond, s’enlise au coton d’un nuage, Une hirondelle en tête assure l’attelage De la nef, survolant l’univers hivernal.
Quand soudain, un éclair me dessert son orage, Le choc trop violent émeut mon timonier, Sous son aile à l’abri, son sein réduit ma rage Craignant du vent le pire, ou périr avant l’âge, Je me fie à ma belle, à son vol printanier.
Silence !
Si mon vers se permet à l’égard affermi, Rien n’est pis qu’une amère et pénible sentence Qu’une âme sensible étreint en silence, Où se reflète encor l’effet d’un tsunami.
Si la raison demeure invisible et muette, Peut-elle être perçue ou comprise au regard De celui qui s’égare au vent qui l’émiette, A devoir explorer du bout d’une lorgnette Un sujet sans réponse, ignorant, l’œil hagard !
Chambellan
Un arbre dans en pré, le soleil ou la pluie Pour exalter nos fleurs, le murmure d’un ru, Sur mon toit deux cailloux pour paraître cossu, Ma charmante et son lit, suffisent à ma vie.
Car elle ne vaut rien, j’en ai fait le bilan, De toutes les saisons mesurant la distance Des bruits sourds des cités au choix de mon élan, Sans ces fruits savoureux dont je suis chambellan Sans nulle autre raison que de vivre en silence.
Je le sais !
J’ose avouer, ma douce, à vous faire le beau Depuis ! Depuis hier ! Que la vie est bien belle Lorsque votre sourire attire une hirondelle, Devinant un hiver ôtant son blanc manteau.
Je sais, quand dans vos yeux, se luit une étincelle, Quand votre bouche étend un souffle sur ma peau, Que bientôt nos frissons fleuriront la tonnelle Et qu’un torride été tombera sa flanelle Sur le pré des soupirs où murmure un ruisseau.
Voyage
Un silence me sert une toile aquarelle, Ma plume emboîte un pas, un voyage en muzain Me lève de bonheur, comme pour prendre un train Quand ma raison s’égare à l’aube qui ruisselle.
Sur la vitre, la nuit se fond en pleurs d’airain Et glisse sur le vers, puis se meurt en dentelle Pour friser son pourtour d’une aurore nouvelle, L’ombre d’une vapeur s’estompe sous ma main, L’obscurité s’enfuit, un chagrin sous son aile.
Faix du silence
L’univers m'instruit, m’ouvre à son déclin les yeux, Parce qu’il donne assez de beauté, d’espérance Pour divulguer, hurlant sans disgrâce, l’engeance Et l’enfer de ce monde en tourment dans les cieux.
Si l’avenir m'apeure ainsi qu’une chimère, Le présent s'endurcit à calmer mes désirs, Il charpente son oeuvre, il s'enfuit, s’accélère, Parfois se perd, cherche un espoir, puis prolifère, Mon existence, danse entre mes souvenirs.
Mon ultime credo, d’être plus sage encore, Plus il est éminent, profond est mon esprit Même si dans l’instant mon âme s’évapore, Il supporte en son sein, mes souhaits de l’aurore Sous couvert d’un refuge enfoui dans la nuit.
Afin de retrouver l’éveil de l’importance, En rimant, je l’atteins comme je tombe épris, Je m’enchaîne aux saisons, j’aime comme j’écris En allégeant le soir, le faix du grand silence.
Martyr
Les mots certainement ne sont que ce qu’ils sont, J’aimerais tellement ma fidèle ingénue, Cette belle saison encore méconnue, Te l’offrir à l’oreille et t’ouvrir son frisson.
Sur un trait sans mimique ou de terne parole, Un verbe recherché n’attisant que l’amour, Qu’on ne peut oublier, que rien ne déboussole, Qui, ferait sur ton sein frémir son auréole, Semblable au diamant irisant son pourtour.
Celui, jamais écrit dix mille ans à la ronde, Pour le balbutier, fier et plus tendrement Que le fait une brise en chuchotant sur l’onde, Celui qui ne s’omet quand un orage gronde, Avant qu’il ne s’égare au bas d’un testament.
Je ne suis qu’un martyr du vers, du romantisme, Mais je l’écrirai, quitte à creuser mon tombeau Jour et nuit, sans répit, pour qu’il soit le plus beau, J’irai même en enfer, soigner mon illettrisme.
Seule et Maître !
L’amour n’a qu’un seul maître en ce monde, la vie, Comme notre existence a le sien, c’est la mort ! Il n’en est de plus faible, il n’en est de plus fort Pour finir au tombeau, leur sort étant obvie.
Nul n’est vainqueur, nul n’est perdant, sauf leurs combats ! Il n’est pire ennemi qu’un feu sans étincelle, Crépitant sans chaleur, s’éteignant sans ébats, Appelant à lutter quand viennent les rabats, Pour se remémorer que la flamme était belle !
Obsession
Sur l’instant qui me frôle, Je la devine au soir, elle pose, me suit En maintenant son rôle, Je l’entends, anxieuse à me bercer la nuit.
Légère, à savourer son duvet qui m’affole Quand se tarde mon lit, Je ne sais où j’en suis, pour qu’elle ne s’envole Mon souffle je retiens, dès qu’un vers dégringole Mon âme se polit.
Jeux interdits
Je soupire et m’effondre à ce que notre terre Offre à perte de vue, un monde et sa beauté, Un jardin merveilleux qui nous sert sa bonté, Serait-ce par amour ? Pour fendre la misère ?
Je la vois, qui s’essouffle et semble s’émouvoir Pour délacer son âme à l’éclat du tonnerre, Nous accueillir, ouvrant son plus bel abreuvoir Aux sanglots d’un cercueil pour ne pas décevoir, Célébrant les vivants, rejouant à la guerre.
Image
Faut-il grand appétit de beauté pour aimer ? L’amour a son image et notre cœur la scelle Quand sont brillants l’esprit et l’âme de la belle, Quoi de pis à notre œil, que vouloir le costumer !
Rapprochant son épine à la rose usuelle Qui brûle sa saison, osant, envenimer A grands coups d’aiguillon le regard qui chancelle Dès que son teint vacille, elle n’est éternelle Que gravée au tombeau, pour mieux le parfumer.
Vol d’automne
Quel est ce ciel d’aurore où mon regard se blesse ? J’avais un beau pré vert, des arbres et des fleurs, Où donc, est mon automne et ses douces couleurs, Hier encor, mon oeil leur cédait sa faiblesse ?
L’horizon, ne me sert que de sombres pâleurs Egarant mon berceau dans sa blanche tristesse Pour n’ouïr que mon ru, murmurant les valeurs De ma douce saison en sons cambrioleurs Sur son flot s’évadant, emportant ma richesse !
Trouble
Si mon regard se perd recherchant l’horizon, Ou se referme au rai dès que son feu redouble, Pourquoi mon œil s’émeut, puis se fond et se trouble Ne perçant que ton ris, tes yeux, comme un tison ?
Explique-moi ma douce, aurais-je été victime, Le cœur serré, bouillant, cognant tel un tambour, Le verbe bafouillant que plus rien ne ranime, Oubliant la saison, le cadran qui s’anime, D’un sort sourd et brutal, que l’on surnomme amour ?
Conscience
Tu veux je sais, me plaire encor bien plus qu’avant, Mon destin désigner, n’en faire qu’un voyage, Me dire saurais-tu, qui, m’attend au virage ? Si, ma voile osera se saisir du bon vent ?
Me forgeant une croix pour m’ouvrir le passage, Mon sort s’interrogeant, réponds au vers suivant ! Qui, de nous deux, sera plus habile ou plus sage ? Chagriné, te criant chaque jour davantage ! Ô conscience, étreins mon sein de son vivant !
Souviens-toi, du gamin vieilli bien avant l’âge En quête d’un chemin loin du sentier mouvant, Qui s’était affranchi, pour sortir d’une rage Aux relents de trépas et s’ouvrir un rivage Sur l’aventure au gré du hasard en rêvant.
Vois son maquis, repeint d’un bel et doux breuvage ! Tu le retrouveras prospère, en observant Le mystère absolu, n’est-ce pas émouvant D’en gouverner la clé sous un poème en gage ! | |
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