L'eau en jets gicle dans la fontaine qui brûle son lit, dans le pré, au bas de la falaise. Sur la berge, le bûcheron ahane de bonheur au-dessus du poirier offert, au regard suppliant qui l'aspire, comme un cavalier arabe devant une oasis. Il fait beau, frais et, en même temps, chaud. Zahra se lève, lascive. Elle se dirige vers la plage, se déhanchant comme une déesse. Les vagues blanches, qui semblent pressées de la recevoir, se bousculent, s'écrasent à ses pieds. Elle entre dans l'eau jusqu'à ce qu'elle lui arrive au bassin puis plonge, s'étend comme un squale. Sans un regard dans le dos, sachant qu'il la suivra dans les tiédeurs de l'océan.
Ce rituel, ils le vivent, le sacralisent chaque année à la nouvelle lune lorsque le printemps passe le témoin à l'été pour les prochains jours et nuits de garde. C'est le jour de leur union. Il y a déjà deux cent quarante lunes de cela, la première nuit.
Brusquement, Zahra se réveille, secouée, le corps tout en sueur. Elle se leva du lit pour aller dans la salle de bain. Comme toujours, dans ces cas là, la bombe vieillissante laissa couler l'eau dans la grande baignoire en forme de coeur jusqu'au cou pour ensuite s'y couler tout doucement. Elle teste d'abord la température de l'eau avec son pied gauche en y trempant le bout de ses orteils. Si cela convenait, toute la jambe suivait puis la droite faisait suivre le reste du corps. Zahra restait environ quarante cinq secondes debout avant de s'appuyer sur les bras pour glisser dans l'eau. Là, elle ressassait, avec l'eau, qu'elle croyait l'écouter, des souvenirs indicibles des moments de miel. Mais depuis, le ciel semble lointain avec ses étoiles bleues et son drap laiteux. Plus de piment ni sel pour accompagner ses nuits devenues plus longues, mornes et mouvementées. Comme ce soir-là. Un miel de fiel. Une véritable tourmente grise...jusqu'au réveil...
- « S'il arrivait que la température soit mal appréciée, que faisait Zahra ? », demanda Bambi, le regard pressant vers Ardo...
Ardo ne répondit pas tout de suite à la question de son amie....
(...)
31 octobre 2015
Maalik Sy avec AL'Prose ( LES HUMAINS)